Il est question de cheminements pluriels dans toute l’oeuvre d’Estelle Lagarde.
C’est de la rencontre avec une architecture, de l’appréhension d’une lumière et d’un certain écoulement du temps que naissent les narrations photographiques de l’artiste, échos à ses propres interpellations qui deviennent à leurs tours les nôtres.
Les personnages rencontrés par Estelle Lagarde dans « Au Château » semblent être les prisonniers consentants de ce lieu.
À l’écart des turpitudes du monde, ils ont connu une évolution qui est propre à chacun d’entre eux. L’humain se matine de végétal, d’animal, reste figé dans un âge, dans une condition, dans un rôle.
Un sentiment familier nous saisit. Les protagonistes nous sont habituels, issus de l’Histoire, de la littérature, du théâtre… Et pourtant quelque chose d’inédit se passe. Un décalage.
L’enfermement et l’isolement ont à la fois stoppé leur possibilité d’émancipation mais également opéré d’étranges mutations ou comportements.
Tout ce petit monde semble régi par des règles qui nous échappent. Ils glissent en silence, en chuchotements, en rires contenus. Prêts à disparaître, à se fondre dans les moulures en bois, dans les pierres, à emprunter des portes dérobées.
« Au Château » est un cabinet de curiosités vivant, autonome. Chaque cadre ancien minutieusement choisi par l’artiste pour enserrer ses photographies introduit et conclut la scène qui nous est offerte, comme le rideau rouge dévoile et termine un spectacle.